Accueilchevron_rightL’Olivier, Le petit journal du Grand Lycéechevron_rightLes arts visuels

Le 3 juin prochain se tiendra la grande exposition du GLFL « Mon école est un musée » au cours de laquelle les travaux de tous les élèves seront présentés à leurs parents. Dans les deux salles réservées à l’Art visuel au primaire, enseignantes et petites mains s’activent en demi-groupe pour terminer une année scolaire de productions artistiques individuelles et collectives. Rencontre avec Salwa Baghosly et Carole Makdessi, enseignantes d’Arts visuels au primaire, qui reviennent sur leur démarche et cette passion pour l’Art qu’elles partagent au quotidien avec les plus jeunes.

Développer sa créativité et son autonomie

« L’Art vise à développer chez l’élève l’aptitude à voir et à regarder, qui sont deux choses différentes », note Carole Makdessi, enseignante d’Arts visuels du CE2 au CM2. Pour se faire, Salwa Baghosly, enseignante des CP et CE1, choisit un thème général, un fil conducteur, qu’elle décline en plusieurs activités dans chaque classe. Comme l’année dernière elle a travaillé avec ses dix-huit classes sur la nature, elle aborde cette année la diversité du monde par ses écritures. De la naissance de l’écriture sur les parois des grottes jusqu’à la 2D et 3D sur ordinateur en passant par les hiéroglyphes tracés sur des tablettes d’argile, la calligraphie arabe et même le braille utilisé par les malvoyants, elle utilise différents outils, mediums et supports pour raconter l’histoire de l’humanité par les lettres et les symboles. Elle s’attache d’une part à développer la créativité, la pensée individuelle et l’imagination des élèves et, d’autre part, à parfaire leur culture artistique. « La créativité fonctionne comme la mémoire, explique l’enseignante. Dès que les élèves sont en contact avec des peintres inspirants et plus nous les amenons au musée, plus ils deviennent créatifs ». Ainsi, sur le thème du graphisme, elle fait découvrir à ses élèves Isidou Isidore, Pierre Alchinsky et Jean Dubuffet tout en développant leur motricité fine, la dextérité manuelle et leur organisation dans l’espace.

 

Travailler pour soi et avec les autres

A partir du CE2, les élèves ont déjà acquis assez de technicité pour participer à des projets monumentaux, des fresques qui sont la marque de fabrique de Carole Makdessi. Elle, aussi, choisit un thème par année qu’elle adapte aux différents niveaux. Cette année, il s’agit du cirque de Ziggy: «  les petits personnages du cirque sont dessinés ou peints par les CE2 et les plus grands personnages par les CM2. Ils travaillent ainsi tous ensemble sur le même projet pour que les plus faibles ne restent pas bloqués en disant ‘je ne sais pas dessiner’ ». Lors de ses activés, les élèves les plus doués s’occupent de la structure et des tâches les plus complexes quand d’autres essayent d’améliorer le travail de leur camarade ou de s’en inspirer pour avancer dans leur propre production. « Le but est aussi de développer chez eux le goût de l’expérimentation qui débouche sur une autonomie renforcée », explique ainsi l’enseignante. Le résultat : vingt-quatre classes qui ont collaboré à la construction de cette toile d’un mètre et demi sur cinq mètres. « Nous faisons aussi des productions collectives pour apprendre à accepter les remarques et le travail de l’autre et apprendre la tolérance vis-à-vis de l’autre », ajoute Salwa Baghosly. D’ailleurs, lorsque nous faisons une exposition, je commente avec les élèves ce qui est réussi et ce qui l’est moins afin de développer leur esprit critique. Nous aiguisons ainsi leur sens de l’observation et travaillons la compétence de l’expression orale. Ils apprennent à donner leur avis et leur point de vue si bien qu’à la fin du CE1, certains analysent parfois des tableaux plus que moi !  », s’amuse l’enseignante.

 

 

 

 

 

Une diversité des outils et des supports pour étendre sa culture artistique

Pour ces jeunes élèves qui peinent parfois à rester attentifs sur une même tâche une séance entière, Salwa Baghosly varie, dès le CP, les textures, les mediums et les supports. « J’ai eu l’idée de peindre toutes les plaques d’égouts de l’école, indique-t-elle. Dès que je leur ai proposé de changer de support, les enfants étaient aux anges ! Il suffit que je leur donne deux chutes de cartons et ils travaillent activement dans le silence complet alors qu’en faisant du dessin, certains se démotivent ou ne tiennent pas en place ». Le but est aussi de les initier à tous les mouvements artistiques. « Certains élèves ne connaissent, en arrivant, que Van Gogh et Picasso ! s’étonne Carole Makdessi. Notre mission est aussi de leur faire connaître plusieurs genres et peintres. Ils ont, cette année, fait un travail sur les personnages ruraux en associant ‘La tête de paysan’ et ‘A la moisson, Marfa et Vanka’ de Malevitch avec ‘Le garçon au filet de papillons’ et ‘La robe rayée’ de Matisse ». « Les parents nous disent souvent qu’ils découvrent de nouvelles formes d’Art grâce à leurs enfants, confie Salwa Baghosly. Quel plaisir d’entendre cela ! ». Les élèves travaillent, de cette même façon, sur le graffiti, les calligraphies, la photographie et d’autres formes d’Art. Dès le CP, ils savent ainsi faire la différence entre un portrait et une nature morte et les enseignantes les familiarisent avec les termes techniques : « lorsque nous parlons d’une œuvre avec ces enfants de huit ou neuf ans, nous faisons référence à la lumière, à la composition, à la perspective, à la superposition des plans et ils maîtrisent ces termes avant la fin du primaire », note Carole Makdessi.

 

Une Interdisciplinarité pour donner du sens à ses productions artistiques

Pour donner davantage encore de sens à leur démarche, les enseignantes travaillent en interdisciplinarité. Elles s’informent régulièrement auprès des professeurs des écoles au sujet du travail effectué en classe ou sont sollicitées pour insister sur un point du programme vu en français ou en sciences : « en CE1, les élèves travaillent le portrait en classe, en production d’écrit. Je fais donc cela également en Arts visuels, en calligramme, avec des lettres découpées dans les revues sur le visage, à l’occasion de la fête des pères, en introduisant les peintres Jean Dubuffet et Gaston Chaïssac, explique Salwa Baghosly. Les élèves apprennent aussi à dissocier, isoler, déformer, détourner une œuvre d’Art en ne prenant qu’une partie, un fragment ».

Plus question de faire « à la manière d’un peintre » comme cela se faisait il y a quelques années encore : « nous ne procédons plus ainsi aujourd’hui pour ne pas bloquer l’élève ou le mettre en situation d’échec parce qu’il n’arrive pas à reproduire à l’identique l’œuvre de l’artiste. Je procède à l’inverse, je vois les techniques utilisées et les démarches à suivre, puis, une fois leurs travaux finis, je montre aux élèves le travail du peintre et ils s’exclament souvent ‘il a fait comme nous !’. Je leur explique alors que nous avons fait comme lui et présente le mouvement ».

Il en est de même pour Carole Makdessi : « en CM1, les élèves ont fait un travail en histoire sur la ‘Vénus de Milo’. Nous l’avons détournée en lui attribuant des métiers comme boulangère ou institutrice et avons conçu une fresque avec une Venus à d’autres identités. L’essentiel est de guider chaque élève dans sa démarche artistique en respectant sa personnalité, il ne faut pas le brimer mais l’encourager à porter un regard critique sur l’Art sous toutes ses formes », conclut l’enseignante.