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MUN, MEU, MAL

Quand les lycéens se mettent dans la peau d’ambassadeurs

Depuis deux ans, le Grand Lycée offre la possibilité aux élèves de seconde première et terminale de participer à trois programmes éducatifs innovants, proposés par la LAU : « MEU », Model Europeen Union, « MUN » Model United Nation et « MAL », Model Arab league. Ceux-ci engagent les lycéens à explorer les problèmes actuels dans le monde, dans les trois langues. A travers des simulations interactives et du matériel pédagogique, les élèves suivent des ateliers pour s’imprégner de la vie diplomatique, discutent et débattent de divers sujets sociaux, politiques et économiques qui affectent et façonnent notre monde.

« ‘Retisser les liens dans un monde fracturé’ : voici le thème de la conférence à laquelle nous allions assister. Ce que vous en pensez? Je peux facilement l’imaginer : ‘En quoi un enfant de 16 ans peut-il permettre un pareil changement à l’échelle mondiale? Comme si cela allait aider à faire avancer les choses…’ Eh bien, c’est ce que je croyais avant de me retrouver dans une salle à débattre des problèmes majeurs que rencontre notre environnement avec des élèves venus des quatre coins du monde »*, affirme Elsa Hindi, élève de première et participante au dernier congrès organisé par le lycée franco-hellénique Eugène Delacroix d’Athènes, en novembre dernier. Comme elle, plusieurs dizaines de lycéens volontaires participent tout au long de l’année à des programmes de simulations diplomatiques.

Un accès au monde des dirigeants

 Né en 2005 à l’initiative de la LAU, ‘Model United Nation’ est un programme, en anglais, qui fait connaître la culture onusienne et la mise en œuvre de moyens pacifiques de résolution des conflits, aux lycéens. Aujourd’hui, le programme accueille plus de 3000 étudiants de 200 écoles participantes lors de ses sessions de formation et de sa conférence finale au cours de laquelle les élèves jouent le rôle d’ambassadeur dans des comités et discutent des sujets d’actualité respectifs. Ce programme a ensuite donné naissance à ceux dénommés ‘Model Europeen Nation’, en français, et ‘Model Arab League’, en arabe.

« L’objectif n’est pas de donner son avis personnel sur les problèmes environnementaux ou les crises politiques et économiques auxquels font face tous les pays du monde puisque nous serions tous d’accord sur le fait qu’ils fragmentent notre planète, note Elsa Hindi. L’objectif est plutôt d’approcher le problème en tant que pays, de peser les bienfaits et les méfaits, d’évaluer et d’optimiser les intérêts du pays lui-même mais également les intérêts communs ». En effet, les élèves, à ces occasions, doivent représenter un pays tiré au sort. Ils ne sont donc pas dans un groupe avec leurs camarades du GLFL mais se mêlent à des élèves d’autres établissements pour défendre un pays, parfois dont la politique est en contradiction avec leurs propres valeurs et idéaux. Ainsi, Elsa Hinda ajoute : « Je vous laisse imaginer à quoi ressemblent nos débats dans le comité environnemental autour des nuisances de l’Homme sur la rare ressource planétaire, l’eau, alors que je représente la Chine qui en est le plus grand pollueur. Un autre exemple est la position que doit adopter le représentant de la République démocratique de la Corée du Nord dans le comité de désarmement et sécurité nationale ».

Des élèves volontaires

« Fin juin 2019, tout a commencé par une affiche sur le mur face au département Vie Scolaire: un modèle des Nations Unies à Athènes sur le thème de l’assemblage d’un monde fragmenté, se souvient Romain Sassine, élève de première. Sans hésiter, je me suis dit que cette ‘ma’ conférence car elle me permettra de m’exprimer et de débattre sur des sujets qui me tiennent particulièrement à cœur ». Comme lui, plusieurs élèves postulent pour intégrer ces programmes. Ils passent alors un entretien devant un professeur et un membre de la direction : « l’entretien nous permet d’évaluer le niveau de langue et la disponibilité, explique Sandra Pardo, proviseure adjointe lycée. Il faut être volontaire pour participer à des activités six samedis dans l’année scolaire ». Sur les motivations, « il y a un peu de tout, continue la proviseure. Des élèves le font juste pour le mettre sur le dossier et d’autres veulent travailler ensuite dans la démocratie, se tourner vers la résolution de conflits en sciences politiques et en diplomatie ». Faten Milford, responsable MUN et MEU au Grand Lycée reçoit tous les ans de nouvelles demandes de profils très différents : « beaucoup de participants viennent des filières scientifiques, pas forcément pour faire ça plus tard, mais plutôt pour développer les compétences orales et argumentatives ».

Cette année, pour le programme ‘Model Arab League’, la professeure Yana Ammar, a choisi onze élèves de seconde : « ce sont de bons orateurs qui avaient surtout un très bon niveau en langue arabe » précise-t-elle. Car, elle le reconnaît, si les lycéens sont réputés pour leur verve et sont d’excellents orateurs, c’est sur la langue qu’ils peuvent parfois être dépassés. « Leur force c’est qu’ils ont plus d’ouverture, surtout ceux qui viennent de la section OIB (Baccalauréat avec option Internationale). Ils sont habitués à faire des contextualisations sur les problèmes du Moyen-Orient. la compétition avec des élèves d’autres établissements les stimule ».

Une fois dans le dispositif, les élèves se rendent à des entraînements « pour savoir comment améliorer leurs connaissances sur les instances internationales et régionales, développer des compétences de recherche et d’interprétation, connaître les règles de procédure dans une conférence, de prise de parole en public, de rédaction d’un exposé de position ou d’une résolution, explique Faten Milford. Ce n’est qu’à la fin du processus qu’ils participent à l’assemblée. Cela prend vraiment du temps, ils doivent faire leurs recherches eux-mêmes. Ce sont eux qui travaillent de façon autonome, indépendamment du professeur et du Lycée ». Puis, lors de la ‘Model Arab League’, par exemple, les élèves représentant l’un des 22 États membres de la Ligue arabe et les délégués étudiants s’efforcent de parvenir à un consensus sur les questions auxquelles les diplomates sont confrontés chaque jour. Les leaders étudiants ont la possibilité de débattre et de former des coalitions afin de rédiger et d’adopter des résolutions visant à résoudre certains des défis les plus difficiles des pays arabes.

Des aventures formatrices

 « Le voyage à Athènes était un projet spécifique ou le Lycée Eugène Delacroix proposait à des établissements du bassin méditerranéen de se regrouper et de faire une séance spéciale sur le même modèle. Au niveau politique, c’était intéressant à la fois de s’intéresser à l’histoire et d’être sur des propositions d’amélioration, de résolution de conflits actuels », explique Sandra Pardo. Trente-huit élèves de seconde et de première ont été choisis par Faten Milford, accompagnée des professeurs d’histoire-géographie, Joelle Daoud et Stéphane Hobeika, pour y aller du 21 au 24 novembre. Les journées de vendredi et samedi, ont été organisés des ateliers et dimanche, a eu lieu la séance finale. « Le jour du départ vers Athènes, j’étais prêt, se souvient Naji el Khoury, en seconde : le costume que j’allais porter pour la première fois, les cravates que mon père m’avait préalablement nouées, les valises fermées ! ». Puis, pendant trois jours, les Lycéens ont rencontré des élèves de tout le pourtour méditerranéen « pour déclencher des débats, susciter des dissensions et prononcer des discours, exprimant nos préoccupations sur les plans social, économique et culturel ; des rôles qui nous ont plongés dans le domaine de la diplomatie », explique Roman Sassine. Mais cela n’a pas tout de suite été évident pour les nouveaux venus : « Je dois admettre que pour quelqu’un qui n’avait jamais participé au MUN, c’était un peu intimidant au début, confie Maya Mansour, en seconde. Cependant, je me suis retrouvée extrêmement bien soutenue non seulement par mes professeurs mais aussi par les présidents et les vétérans MUNers de mon comité, ce qui m’a mis à l’aise ».

Et puis, la magie opère ! Au bout du deuxième jour : « Nous n’étions plus de simples adolescents, nous nous sommes transformés en diplomates et ambassadeurs, affirme Marco Nahas, en première. Dans un premier temps, il a fallu former deux alliances entre les pays selon leurs convictions et écrire une résolution générale. Ensuite, chaque résolution a dû être présentée à tout le comité afin de pouvoir proposer des amendements et débattre pour pousser les autres délégations à voter pour ou contre les différentes solutions possibles. Finalement, une résolution par comité a été soumise à l’assemblée générale, qui rassemble tous les pays de tous les comités. Ces derniers ont finalement voté, selon leurs convictions respectives afin de faire passer la résolution ou, au contraire, la rejeter ». A la fin de l’événement comme pour MAU, MEU, MAL, des récompenses sont attribuées aux meilleurs délégués sur la recherche, l’aisance, l’esprit de synthèse.

 

Une génération plus éveillée

« Atterrissant sur le tarmac de l’aéroport international de Beyrouth, une idée positive m’a traversé l’esprit : le monde de demain est entre les bonnes mains d’une génération qui lutte pour la paix, le dialogue et la diversité », confie Romain Sassine, emprunté d’émotions. En plus d’acquérir des connaissances géopolitiques et diplomatiques, les élèves travaillent aussi leurs compétences de l’oral : « j’ai vu devant moi des personnes se transformer au bout de trois jours, explique Marco Nahas : les personnes aux allures timides ont pris la parole maintes fois sans aucune hésitation et ont débattu admirablement. Des personnes trop promptes et vives se sont au contraire calmées et ont dialogué avec diplomatie et patience. Personnellement, j’ai à présent beaucoup plus d’aisance à l’oral et j’arrive de mieux en mieux à improviser des arguments et à les rendre cohérents et persuasifs. Cette expérience a donc fait naître en nous une réelle confiance en nous. Nous en sommes réellement ressortis grandis et changés ». « Alors je vais vous le dire, conclut Elsa Hindi, oui un adolescent de 16 ans peut apporter du changement et prend conscience de ce qui se passe autour de lui. Oui, il peut contribuer en apportant des idées et en essayant de réfléchir à des solutions qui feront de notre monde un endroit meilleur où vivent les individus dans un cadre de liberté d’égalité et de sécurité dans un environnement saint. Il peut retisser les liens dans un monde fragmenté. Bientôt ce sera à notre tour d’entrer en scène. Si nous, la future génération, ne commençons pas à penser à ce genre de choses alors qui le fera? ».

 * Propos tirés de textes écrits par les élèves

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