Accueilchevron_rightL’Olivier, Le petit journal du Grand Lycéechevron_rightBrevet libanais / Brevet français

Au GLFL, les élèves présentent le brevet libanais ou, s’ils ont obtenu la dispense des examens libanais, le brevet français. Sur 242 élèves cette année, deux tiers passent l’examen libanais et un tiers le français. L’établissement agence donc les programmes et les méthodes afin de pouvoir les préparer au mieux à ces examens qui marquent la fin du collège et l’entrée au lycée pour ses élèves. Explications de Cédric Toiron, proviseur adjoint collège.

Quelle est la conséquence de ces deux examens sur les programmes du collège au GLFL ?

Les élèves passant le brevet Libanais et le brevet français ne suivent pas tout à fait le même programme et cela crée des différences. Celles-ci commencent en 5e, s’accentuent en 4e et en 3e avec, d’une part, des cours d’Arabe et d’Histoire-géographie arabe en plus mais aussi, d’autre part, en Mathématiques, Physique chimie et SVT, des écarts à la fois dans les contenus et les méthodes.

 

Quelle est la différence majeure entre les deux visions pédagogiques libanaise et française ?

La principale différence est dans le rapport aux compétences. Le brevet français porte comme caractéristique qu’il est évalué pour moitié par cinq épreuves notées (voir encadré) et pour moitié sur le contrôle continue de la 5e à la 3e avec huit compétences traversées par plusieurs disciplines. Il s’agit par exemple de « comprendre, s’exprimer en utilisant la langue française à l’oral et à l’écrit », « comprendre, s’exprimer en utilisant les langages mathématiques, scientifiques et informatiques », « comprendre, s’exprimer en utilisant les langages des arts et du corps », « la formation de la personne et du citoyen » ou encore « les représentations du monde et l’activité humaine ». Les quatre niveaux de maitrise sont : insuffisante, fragile, satisfaisante et très bonne. Chaque discipline évalue deux à trois compétences. Nous essayons ainsi, dans le système français, de contrecarrer la logique des notes en encourageant les élèves à retravailler leurs compétences jusqu’à ce qu’ils les maitrisent toutes en fin de cycle.

Cette évaluation par compétences n’est pas employée dans le programme libanais. Au Grand Lycée, nous mettons un point d’honneur à garder cette richesse dans toutes les classes du collège, y compris celles dites « programme libanais » (PL).

 

Comment préparez-vous vos élèves à l’examen ?

Nous organisons deux épreuves blanches pour tout le monde à l’écrit avec une préparation à l’oral uniquement pour les élèves qui passent le brevet français puisque l’examen comporte une épreuve orale, ce qui n’est pas le cas pour le brevet libanais. Une idée que nous étudions est également de préparer nos élèves du programme libanais dans l’optique de la préparation au nouveau baccalauréat qui met en place une épreuve orale importante. Comme ils vont tous passer le bac français, cela nous paraît important que ces élèves aussi puissent profiter de cette préparation.

Notre difficulté est que leur programme de 3e PL est extrêmement chargé car ils ont des cours d’Arabe et d’Histoire-géographie arabe en plus : les élèves avaient 39 heures de cours l’année dernière, 37 heures cette année, nous espérons pouvoir descendre à 35 et demi l’année prochaine, ce qui reste une charge horaire importante. Ajouter du travail tout au long de l’année s’avère compliqué. Par contre, il nous semble judicieux de leur faire travailler cet oral au mois de juin, car ils passent le brevet plus tôt que les élèves dispensés, avec des interventions en théâtre, entre autres.

 

Quels sont les aménagements durant l’examen pour les élèves à besoins particuliers ?

Pour nous, il est très important de pouvoir accompagner les élèves aussi au moment des examens. Cela va du temps supplémentaire à des dictées aménagées mais aussi à des élèves qui peuvent le passer sur un support informatique, avec un secrétaire de séance. Tout cela est monté avec le service des examens et s’étaye sur les dispositifs de Plan d’Accompagnement Personnalisé (PAP) ou Projet d’Accueil Individualisé (PAI) des années précédentes.

Il existe un peu moins d’individualisation sur le programme libanais mais cela se fait aussi avec, pour les besoins spécifiques, une démarche spéciale à entamer auprès du Ministère.

 

Serait-il possible d’homogénéiser les deux programmes et de n’avoir que des classes mixtes LV/PL au collège ?

Nous réfléchissons, en effet, en ce moment, à cette éventuelle homogénéisation afin de créer un « cursus Grand Lycée » dans lequel les sciences seraient identiques pour tous avec seulement une différence en Arabe et en Histoire-géographie du programme libanais. Nous ne parlerions même plus de classes mixtes mais de classes avec un même programme qui se différencie et avec deux examens à la fin de la 3: le brevet libanais, le brevet français.

Depuis le début de l’année, nous avons constitué un groupe de travail avec Antoine Salloum, directeur adjoint libanais, des professeurs et Clarisse Chebli qui travaille en lien avec l’USJ dans le cadre d’un Mémoire de Master sur les programmes de collège. Elle nous amène des éclairages d’autres établissements confrontés à cette même problématique. Nous espérons déployer ce « cursus Grand Lycée » à la prochaine rentrée.

 

Quels seraient les avantages pour les élèves ?

Nos élèves entrent tous en Seconde pour suivre le même programme français, mais les élèves de PL ont un peu plus de connaissances que les élèves « dispensés » dans les matières scientifiques puisqu’aujourd’hui, ils apprennent en 3e des données mathématiques qu’ils reverront en Première. Il s’agit d’attendus de l’examen libanais que nous remplissons. Avec ce « cursus Grand Lycée », il s’agirait plutôt d’enrichir le programme des dispensés.

D’autre part, certains élèves dispensés ne connaissent que peu l’histoire du Liban. Nous réfléchissons donc à la possibilité d’ajouter des cours d’Histoire libanaise en langue française pour leur permettre de mieux comprendre la culture de ce pays, conformément aux « deux cultures, trois langues », cœur du projet pédagogique de la Mlf et du GLFL. De la même façon, pour les élèves qui ont choisi l’espagnol en LV2 en 5e et qui n’étudient plus l’Arabe, nous avons mis en place une heure de « conversation libanaise » pour qu’ils puissent mieux s’insérer dans le pays dans lequel ils vivent.

 

Les spécificités du programme libanais

3 questions à Antoine Salloum, directeur adjoint libanais au GLFL

Quelles sont les différences entre le programme français et le programme libanais ?

Il existe des différences dans le programme et dans la méthode d’enseignement. Sur le premier point, le programme libanais va plus loin dans les connaissances surtout dans les matières scientifiques ou certaines notions ne sont vues dans le programme français qu’au lycée. Sur le deuxième point, dans la méthodologie, l’approche est différente. Le programme libanais est conçu à partir de méthodes traditionnelles. Dans les matières scientifiques, les élèves vont peu au laboratoire par exemple. C’est donc un enseignement traditionnel : dans certains cas, l’enseignant expose une expérience-démonstration. Les élèves sont donc moins dans l’expérimentation et plus dans l’apprentissage de connaissances qui nécessite des compétences mnémoniques, là où le programme français mise davantage sur la capacité à agréger des données pour répondr à un problème donné.

Pour quelles raisons les élèves du programme libanais se plaignent-ils d’une trop lourde

 

charge de travail ?

Si nos élèves suivaient tous le même programme, ils ne se plaindraient pas d’une surcharge de travail car ils n’auraient pas de point de comparaison. Pourtant, il ne faut pas croire que le programme français est allégé, bien au contraire. C’est vrai que dans les contenus, c’est un peu moins dense, mais dans les méthodes, ça ne l’est pas. On demande beaucoup d’autonomie et de réflexion à l’élève, et de développer aussi plusieurs compétences. Je pourrais défendre les deux et l’idéal est de pouvoir alléger un peu les connaissances en faveur des méthodes françaises dans le programme libanais, et d’augmenter les connaissances en puisant dans celles du le programme libanais tout en gardant l’évaluation par compétence dans le programme français. C’est notre démarche dans l’élaboration du « cursus Grand Lycée ».

Je rappelle aussi que le brevet libanais n’est pas seulement un diplôme, c’est aussi un passage obligé pour accéder au lycée. Pour les élèves suivant le programme libanais et leurs parents, cela implique une charge de travail conséquente et une pression supplémentaire.

 

Quels sont les points forts et les points faibles des élèves du GLFL au brevet libanais ?

Pour l’évaluation du Français au Grand Lycée, nous sommes au-delà de ce qui est exigible au brevet libanais, c’est sans aucun doute leur point fort. Nous sommes également au-dessus de la moyenne nationale dans les matières scientifiques qu’ils réussissent pour la plupart haut la main.

La problématique est récurrente : les élèves du Grand Lycée ont tendance à penser qu’ils ont des difficultés en Arabe mais il faut relativiser. Les résultats de nos élèves correspondent à la moyenne nationale, ce qui est certes en dessous des autres matières, mais très acceptable sachant qu’ils évoluent dans un milieu francophone. Il ne faut pas oublier que nos élèves ne parlent pas arabe dans la cour mais français, et c’est souvent le cas aussi à la maison.